Je pensais avoir trouvé comment naviguer dans le système d'éducation (voir Le laissez-passer A-39), mais non. Après avoir vécu une année formidable dans une école formidable avec une équipe formidable, j'ai dû quitter car mon poste a été octroyé à une prof permanente.
LECTEUR INCRÉDULE
Comment, Isabelle, après plus de 15 ans dans le système d'éducation, tu n'as pas encore ta permanence?
MOI
Ben oui, j'ai eu ma permanence, mais j'ai dû démissionner (voir Le laissez-passer A-38). En éducation, quand tu démissionnes, tu gardes ton salaire et ton expérience, mais tu perds ton ancienneté. Tu dois repartir à zéro, faire de la suppléance et avoir les derniers contrats disponibles. Un peu comme si un gérant chez St-Hubert démissionnait et qu'il ne pouvait plus travailler que comme plongeur dans un autre restaurant, mais avec son salaire de gérant.
LECTEUR INCRÉDULE
?
MOI
En effet.
Je savais évidemment que ça risquait d'arriver. Mais je ne pensais pas que ça me ferait aussi mal. Je n'avais plus la force de vivre de tels déchirements à chaque fin d'année scolaire. Ce déracinement-là devait être le dernier.
J'ai beaucoup erré pendant l'année. J'ai cherché encore sans succès une porte de sortie professionnelle. Mais pour faire quoi? L'enseignement me passionne, je m'y sens à ma place et je suis au sommet de l'échelle salariale.
Bref. En pleine pénurie de personnel enseignant, je n'avais pas de poste à la rentrée scolaire. J'ai préféré faire de la suppléance dans les écoles de mon quartier que d'avoir une tâche de fou. Je n'ai évidemment jamais manqué de travail.
J'avais besoin de projets, alors j'ai entrepris de monter une chorale en parascolaire à l'école de mes enfants et à mon école formidable. Le projet est devenu beaucoup plus gros que ce que j'avais envisagé, mais a été un grand succès.
J'ai fini par prendre une tâche en orthopédagogie dans mon école formidable. Mais comme dans à peu près tout ce que j'essaie de nouveau et de différent, je me suis ennuyée au bout de deux mois. J'ai donc décidé de me trouver des défis ailleurs et je me suis inscrite (encore!) à l'université pour compléter ma formation en composition instrumentale.
Alors que j'étais face au néant pour la rentrée 2023, une éducatrice formidable de mon école formidable qui assistait aux répétitions de la chorale m'a parlé de l'école de son enfant, une petite école primaire privée pas trop loin qui se cherchait un prof de musique à temps partiel.
!!!
J'ai refait mon CV, envoyé ma lettre de présentation et passé une entrevue surréaliste où tout semblait trop beau pour être vrai. Une école comme j'en rêve depuis des années! Mes deux dernières directions m'ont écrit des lettres de recommandation formidables.
Après mon entrevue, j'ai réalisé que j'avais déjà failli appliquer au même poste 5 ans auparavant. J'avais discuté avec l'enseignante en poste depuis 16 ans et rédigé ma lettre. Ça m'avait fait un pincement au coeur de passer mon tour, mais j'étais en congé de maternité. Je pensais ne jamais revoir une offre comme celle-là.
Bref.
Chaque chose en son temps! J'ai obtenu le poste, je quitte le système public, je pose mes valises au privé et je commence à m'enraciner cet automne dans ma nouvelle école formidable!!!
LECTEUR INCRÉDULE
Tu ne trouves pas que tu utilises un peu trop le mot formidable?
MOI
Il y a certes une paresse intellectuelle de ma part de ne pas chercher des synonymes, mais le système d'éducation déborde réellement de toute part de gens formidables!!!